L’entraînement physique c’est quoi ?

Introduction

L’entraînement physique est un processus physiologique dans lequel l’arbitre améliore sa condition physique pour répondre aux exigences de son niveau d’arbitrage.

L’entraînement n’est pas une science exact mais la qualité des séances en dehors des principes, des contenus, de la planification et de la récupération, dépendra de l’écoute de son corps, de ses sensations pendant et après effort et de la relation arbitre préparateur physique. C’est la qualité de l’écoute qui permettra d’optimiser la performance physique de l’arbitre ou de l’assistant lors de ses matchs.

Beaucoup de dirigeants, d’observateurs, de techniciens, d’arbitres pensent qu’en allant courir 2 à 3 fois par semaine ils s’entraînent, alors qu’ils sont dans l’entretient physique car les paramètres que j’explique ci-dessous dans chaque chapitre ne sont pas appliqués. Il ne suffit pas de faire des footings au-delà de 1 heure qui n’a aucun intérêt, du fractionné ou du cardio comme je l’entends pour être dans l’entraînement.

En tant qu’observateur au niveau régional et préparateur physique, je constate que de nombreux arbitres se blessent. Je pose des questions. Est ce que les charges et les volumes des séances sont adaptés à l’arbitre ? Est ce que chaque semaine la prévention de blessures fait parti d’une séance ? Est ce que la reprise de la course est progressive après une longue période d’inactivité ? Est ce que la planification des séances est cohérente dans la semaine ? Est ce que le contenu de l’échauffement correspond au thème de la séance ou au match ?

Si on veut employer le mot « entraînement », toute séance doit être justifiée sur un plan physiologique, dans son contenu par la charge et le volume mais aussi dans sa planification de la semaine.

I Quelques grands principes à respecter

La fréquence :

En dessous de 3 séances par semaine on ne développe que très lentement et insuffisamment sa condition physique.

L’assiduité :

Une qualité se développe lentement (6 à 8 semaines), se maintient aisément à raison de 3 séances par semaine, mais se perd très vite 2 à 3 semaines sans un nombre satisfaisant de séances par semaine.

L’intensité:

A gérer en fonction de la qualité à développer. C’est le point le plus délicat à gérer. D’où la nécessité pour l’arbitre de connaître ses seuils aérobie et anaérobie, d’avoir un programme hebdomadaire précis et d’effectuer au cours de la saison des séances d’évaluations (type vameval ou 45/15), afin de déterminer précisément l’intensité des séances.

Le temps à consacrer :

Le temps consacré à chaque exercice est inversement proportionnel à l’intensité de ce dernier. Plus l’intensité est élevée, plus la durée doit être écourtée, mais doit demeurer suffisante pour solliciter la filière énergétique choisie.

La progressivité :

Pour que l’organisme réagisse correctement au stress de l’entraînement, il faut progressivement augmenter les charges et les volumes de travail en commençant toujours raisonnablement. Si on répète toujours les mêmes séances, si on sollicite toujours la même filière énergétique, le corps n’a plus besoin de s’adapter, on ne progresse plus. La clé de la réussite c’est donc de varier ses entraînements et par là même de changer ses habitudes.

La spécificité:

Elle se définit en fonction des exigences de la fonction d’arbitre ou d’arbitre assistant, de la discipline que l’on arbitre, des objectifs recherchés, des périodes de la saison et surtout des capacités de l’arbitre ou de l’assistant.

II. Principes de surcharges et surcompensation

La base de l’entraînement physique repose sur le principe de cumul de stimulations dans le temps. C’est le processus de surcompensation par application entre charge de travail et récupération permettant d’assimiler le travail effectué.

Suivant ce procédé, si une charge d’entraînement est appliquée à l’organisme, celui-ci va mettre en œuvre des processus de restauration pour passer d’un épuisement énergétique momentané à un niveau supérieur par rapport au niveau initial. Si une nouvelle charge est appliquée à ce moment là, le phénomène se renouvellera et le potentiel augmentera, ce que l’on appelle « le phénomène de surcompensation ».

En revanche si les charges de travail ne sont pas suffisantes ou les filières énergétiques mal choisies en fonction des jours dans la semaine lors des séances d’entraînement et donc trop éloignées ou trop rapprochées, les réserves retrouveront leur état de départ. Exemple la filière énergétique aérobie comme le footing veille de match au lieu de la filière énergétique anaérobie alactique comme le travail de vivacité ou la filière énergétique anaérobie lactique utilisée 96h avant un match au lieu de 72h voire 48h minimum.

Cette surcompensation est valable sur une succession de séances d’entraînement. Il s’agit de l’effet cumulé, estimé en fonction du nombre de séances (3 minimum) et de l’intensité. La difficulté de la gestion de cet ensemble d’alternances  » stimulation – récupération  » désigné sous le terme de charges d’entraînement, est de ne pas créer une fatigue générale persistante négative (surentraînement) ou une stagnation voire une diminution des capacités (sous-entraînement).

On ne peut pas créer de « phénomène de surcompensation » pour un arbitre qui ne ferait que 2 séances d’entraînement même de qualité ou qui ne ferait que des activités physiques. L’arbitre serait dans l’entretien physique et non dans l’entraînement.

Il faudra dans une semaine de compétition, que le préparateur physique identifie et quantifie les charges d’entraînement avec le souci de la récupération pendant et en dehors des séances pour mener avec efficacité la préparation physique de l’arbitre pour que celui-ci donne sa pleine mesure lors du match.

Beaucoup d’arbitres vont chercher leurs séances « clé en main » sur internet, sur des applications ou des programmes leurs sont envoyés sur plusieurs semaines. A ma connaissance il n’existe pas de programme spécifique pour arbitres ou assistants qui sont planifiés chaque semaine. Il est impossible d’appliquer le phénomène de surcompensation si les programmes sont établis sur plusieurs semaines. Exemple si l’arbitre débute la semaine avec un match le samedi et si le match est décalé au dimanche voire reporté, la planification et le contenu doivent être modifiés.

III. La planification

La planification est la prise en compte de tous les paramètres liés à un objectif compétitif désigné. Cette planification sert à construire un programme hebdomadaire rigoureux et cohérent pour être performant physiquement le jour du match ou de son test physique.

L’activité physique d’un arbitre, contrairement à un sport comme l’athlétisme, est hebdomadaire. Si la période d’avant saison, ou la période après la trêve hivernale permettent de développer certaines filières énergétiques, il est difficile dans une semaine « classique » d’entraînement de programmer deux ou trois séances de développement d’une même filière. Cela va dépendre de plusieurs paramètres (voir chapitre individualisation).

Dans le cadre de l’activité d’un arbitre où sa compétition est le week-end, le samedi ou le dimanche voire en semaine pour des arbitres fédéraux, il serait inconcevable d’établir une planification sur 15 jours voire un mois. Un arbitre qui déciderait le jour même du contenu de sa séance, sans anticiper celle du lendemain ou surlendemain serait impensable.

IV. Place de la récupération dans le processus d’entraînement

La récupération est l’élément régulateur de la planification. Elle forme avec l’effort le couple indissociable qui permet de faire progresser physiquement l’arbitre.

La récupération fait partie intégrante de l’entraînement. C’est notamment le cas dans la théorie de surcompensation qui consiste à alterner des périodes d’exercices suffisamment intenses (c’est-à-dire à fortes charges) et des périodes de repos induisant une augmentation du potentiel physique de base. Elle joue un rôle dans le processus d’entraînement et dans la prévention du surmenage (physique et psychique). Mais en quoi consiste exactement la récupération ? Quels sont les moyens de récupérer ? Comment alterner entraînement et récupération ? Le sujet de la récupération fera l’objet d’un article dans les prochains mois.

La récupération correspond au temps nécessaire après un effort physique fourni pour que l’organisme retrouve un état physiologique lui permettant de fournir à nouveau un effort équivalent, voire plus important que le précédant.

Si ce temps de repos n’est pas respecté, on court le risque de voir apparaître le syndrome de surentraînement, c’est à dire la diminution de la performance malgré le maintien ou l’augmentation du niveau d’entraînement.

On l’oublie trop souvent mais la récupération est l’une des clés de l’entraînement. Elle est aussi importante que les séances d’entraînement.

V. L’individualisation

Un préparateur physique qui entraîne plusieurs arbitres doit individualiser et adapter le contenu des séances en fonction de plusieurs paramètres qui sont :

  • Le match précédent
  • Le match à venir
  • Ses jours d’entraînement
  • La discipline de l’arbitre (on ne s’entraîne pas de la même façon que l’on soit arbitre de foot à 11, arbitre assistant, arbitre de rugby, arbitre de handball ou arbitre de basket-ball)
  • Des tests physiques et physiologiques
  • Du niveau de l’arbitre (un arbitre Départemental ne s’entraînera pas de la même façon qu’un arbitre de niveau Régional voire National)
  • De l’état de forme du moment.
  • De l’âge et du sexe
  • De la période de la saison
  • Des infrastructures à sa dispositions
  • Du contenu des séances de sports au lycée pour des jeunes arbitres en sport étude.

La qualité de l’entraînement dépend donc de son degré d’individualisation car tous les arbitres n’ont pas les mêmes qualités ni les mêmes besoins. Certain(e)s vont avoir besoin de travailler sur l’aspect aérobie, d’autres sur l’explosivité et d’autres sur l’aérobie et l’explosivité donc trois profils différents trois préparations physiques différentes.

A l’heure actuelle dans le milieu de l’arbitrage du football, on n’individualise pas le contenu des séances. Que l’on soit arbitre de foot à 11, arbitre assistant ou arbitre de futsal le contenu est le même. Pour faire un parallèle avec les joueurs de football ou de rugby, je ne pense pas qu’un gardien de but ou un défenseur central s’entraîne physiquement comme un milieu de terrain, un première ligne ou un trois quart centre s’entraîne de la même façon qu’un arrière. Les qualités exigées à ces postes ne sont pas du tout les mêmes et donc le travail physique est individualisé.

Conclusion

Pour être dans l’entraînement, il est important de prendre en compte tous les paramètres qui ont été cités. Si l’arbitre n’applique pas tous ces principes lors de ses séances, on ne peut pas utiliser le mot « entraînement ». Il ne suffit pas de courir 3 à 4 fois par semaine pour être dans l’entraînement. Si on veut parler ou faire de la préparation physique, il ne suffit pas d’encadrer un groupe d’arbitres ou de s’entraîner soi-même. Cela nécessite un savoir, des compétences physiologiques, techniques et avoir une expérience, un vécu de l’entraînement sur le terrain avec des arbitres. Cela ne s’improvise pas, tout le monde ne peut pas se prendre pour un préparateur physique !

Eric BOITARD

DESS Préparateur Physique