Introduction
La blessure n’est pas une fatalité, elle résulte de plusieurs facteurs et malheureusement elle peut laisser des séquelles durable qui peut empêcher l’arbitre ou l’assistant(e) de pouvoir pratiquer son activité. Les blessures sportives peuvent arriver à n’importe qui, à tout moment lors d’un match ou d’une séance, quel que soit le niveau, l’âge et les capacités physiques. Toutefois si des précautions sont prises en amont, le risque de blessures peut être considérablement réduit. Pour savoir comment prévenir des blessures, quels sont les groupes musculaires à travailler et quels sont les exercices les plus adaptés, il faut se faire accompagner par un professionnel soit un préparateur physique soit un kinésithérapeute.
Dans le milieu de l’arbitrage du football que je connais en tant qu’ancien arbitre et observateur depuis quelques saisons dans la ligue de la Nouvelle Aquitaine, mais aussi après avoir échangé avec des arbitres de basket-ball, de rugby et de handball, à ma connaissance on ne fait pas assez voire pas du tout de la prévention de blessures. Depuis le mois d’août de cette saison 2025 -2026, des arbitres et des assistants se sont blessés pendant leurs préparations, lors de leurs séances ou de leurs matchs. Je pose deux questions : « Combien d’arbitres et d’assistant(e)s ont intégré dans leur préparation d’avant saison ou intègrent pendant la saison toutes les semaines de la prévention de blessures à base de renforcement musculaire en excentrique et de la proprioception ? » Combien d’arbitres et d’assistant(e)s avant une rencontre font l’échauffement « russe » dans le vestiaire ? » La réponse aucun aux deux questions sauf celles et ceux qui sont suivis par un préparateur physique.
Avec le nombre d’arbitres blessé(e)s chaque saison et donc indisponibles pour arbitrer ce qui engendre des difficultés dans les désignations, à mon sens la question sur la prévention de blessures devrait animer les instances départementales, régionales et fédérales et se poser la question : « Comment peut-on aider les arbitres et les assistant(e)s pour éviter de se blesser ?».
Beaucoup d’arbitres et d’assistant(e)s vont chercher leurs séances « clé en main » sur des sites internet, sur des applications ou des programmes leurs sont envoyés sur plusieurs semaines. Les programmes ne sont pas adaptés à l’arbitre ou à l’assistant(e), il n’y a aucun suivi et aucune communication, après il ne faut pas s’étonner que les arbitres et les assistant(e)s se blessent. Autre exemple où un(e) arbitre peut se blesser, c’est lors de sa reprise au mois de juillet ou au mois d’août. La raison est que pendant un à deux mois, l’arbitre sera au repos et donc n’aura fait aucune activité physique et après un repos si long même si la reprise est en douceur, il y a risque de blessures car l’organisme n’a pas été préparé pendant quelques semaines entre la période de repos et la reprise de l’entraînement (voir l’article la planification de la trêve estivale). Je pose une question : « Combien d’arbitres ou d’assistant(e)s sont passé(e)s par une reprise d’activité avant la reprise de l’entraînement ? » La réponse aucun sauf celles et ceux qui sont suivis par un préparateur physique.
Mon travail de préparateur physique a deux axes. L’un préparer physiquement chaque semaine les arbitres et les assistant(e)s dont j’ai la charge pour qu’ils ou qu’elles soient performant(e) lors de leurs matchs ou de leurs tests physiques et l’autre agir sur la prévention de blessures tout au long de la saison.
La prévention de blessures doit être le fil rouge sur toute une saison et pour optimiser ce travail de prévention il doit se faire conjointement entre le kinésithérapeute et le préparateur physique pour mettre l’arbitre ou l’assistant(e) dans les meilleurs conditions pour ses matchs. Pour qu’un programme de prévention soit efficace, il est important de considérer chacun des facteurs clés suivant : Le contenu des séances, la qualités d’exécution des exercices, la quantité de la charge de travail, le volume de travail, la progressivité, la récupération entre les séances, l’état de forme de l’arbitre ou de l’assistant(e) et la période de la saison.
I La proprioception
Le travail de proprioception doit être intégré dans les séances d’entraînement que ça soit en période de préparation d’avant saison et pendant toute la saison pour prévenir des blessures articulaires comme les entorses de la cheville. Il ne faut pas attendre d’être blessé(e) pour ensuite dans sa rééducation faire ce travail en réathlétisation. Malheureusement ce travail ne fait pas partie chaque semaine voire tous les 15 jours des contenus de séances chez les arbitres et les assistant(e)s de tous niveaux et de toutes disciplines.
Ce travail proprioceptif doit se faire conjointement entre le kiné et le préparateur physique. Pas besoin d’avoir un trampoline ou un bosu, avec très peu de matériel (coussin de proprioception, coupelles, balles de tennis et ballon) on peut intégrer ce travail dans une semaine. Ces exercices peuvent se faire aussi à la maison.
II L’échauffement
Que l’on soit arbitre de niveau départemental, régional ou fédéral, l’échauffement fait partie des éléments indispensables à la prévention de blessures. En tant que préparateur physique et observateur, je m’aperçois avant les matchs lors de la reconnaissance du terrain, qu’il est plus important pour les arbitres de bien installer les plots pour délimiter la zone d’échauffement pour renvoyer une bonne image et faire une bonne impression à l’observateur avec un échauffement à base de courses à n’en plus finir, que de commencer par un bon échauffement russe dans le vestiaire.
III Le renforcement musculaire.
J’entends beaucoup d’arbitres faire du renforcement musculaire ou de la musculation sans connaître les régimes de contractions musculaires. Il faut savoir quand matière de prévention on va solliciter le régime excentrique. Ce travail se fera pour un arbitre ou un assistant(e) sur les mollets, les ischios jambiers, les adducteurs et les abducteurs sans oublié le psoas.
Autre point, des arbitres et des assistant(e)s se dirigent dans les salles à la mode pour faire des squats. Je pose une question : « Quel est l’intérêt pour des arbitres ou des assistant(e)s de faire des squats ? La réponse aucun sauf de prendre le risque de se blesser sur un plan musculaire avec une déchirure des ischio-jambiers parce qu’il va se créer un déséquilibre entre quadriceps et ischio-jambiers, ainsi qu’une trop grande sollicitation et une usure des ménisques sur le long terme. Par contre faire de la musculation à dose homéopathique suivant son vécu guidé par un préparateur physique avec parallèlement de la prévention de blessures cela sera bénéfique pour l’arbitre ou l’assistant(e).
IV Les étirements
Une autre clés pour éviter les blessures sont les étirements passifs. Chaque arbitre et assistant(e) est différent(e) sur un plan morphologique et à mon sens une visite chez le kiné pour apprendre à bien étirer chaque groupe musculaire et à quel moment le faire n’est pas superflu. Autre point combien d’arbitres et d’assistant(e)s en fin de saison pendant la trêve estivale lors de la phase de repos et lors de la trêve hivernale, vont faire un bilan musculaire, articulaire et tendineux avec leur kiné pour corriger certains points et anticiper des éventuelles blessures lors de la préparation et pour la seconde partie du championnat ? La réponse aucun(e) !
V L’entraînement invisible
Sans être dans un excès démesuré, un entraînement invisible (alimentation, hydratation, sommeil) pas adapté à l’activité physique que peut pratiquer un arbitre et source de blessures. On l’oublie trop souvent mais la récupération est l’une des clés de la prévention de blessures. Elle est aussi importante que les séances d’entraînement.
Si l’arbitre n’effectue pas une bonne récupération, il va commencer l’entraînement suivant avec des fibres musculaires qui ne sont que partiellement réparées et des réserves énergétiques entamées. La dégradation provoquée par la séance sera donc plus importante et, à un moment donné, il y aura un problème allant de la simple contracture jusqu’à l’élongation ou la déchirure ! Le même principe s’applique sur les articulations.
Une blessure lors de la préparation d’avant saison ou pendant la saison est souvent désastreuse car elle annihile le travail réalisé ou une partie de celui-ci ! Autre petit conseil : il ne faut pas forcer et finir la séance à tout prix si l’on sent une petite gêne musculaire, tendineuse ou autre. Il faut être à l’écoute de son corps, des signaux qu’il envoie et en parler à son préparateur physique pour que celui-ci modifie la ou les séances suivantes. Avec des programmes « clé en main » sur internet, sur des applications ou des programmes qui sont envoyés aux arbitres et aux assistant(e)s c’est impossible !
Conclusion
Je constate après de longues années d’expérience de préparateur physique chez les arbitres et les assistant(e)s de tous niveaux et de toutes disciplines, dans la prévention de blessures comme dans beaucoup de domaines athlétiques les arbitres et les assistant(e)s sont très en retard. La prévention de blessures ne fait pas partie de leur culture. Malheureusement à ma connaissance, il n’existe pas d’études qui ont été publiées sur les blessures des arbitres et des assistant(e)s. L’objectif d’une étude serait d’analyser les causes en fonction du niveau, de l’âge, du sexe, des conditions (entraînement ou match), de la période de la saison et ensuite après analyse donner des orientations et des clés aux arbitres et aux assistant(e)s pour éviter de se blesser. Il ne suffit pas d’être coach sportif, d’avoir une certification en préparation physique, une licence STAPS pour faire de la prévention de blessures sur les arbitres, les assistant(e) ou toutes autres personnes. Cela demande des compétences professionnelles. On ne s’improvise pas kinésithérapeute ou préparateur physique !
Eric BOITARD
DESS Préparateur physique
