Le travail intermittent c’est quoi ?

Introduction

L’activité physique d’un arbitre de football ou de rugby de part la grandeur du terrain de jeu intègre un grand nombre de courses différentes à hautes intensités avec des temps de récupération ce qui n’est pas le cas d’un assistant, d’un arbitre de futsal, de handball ou de basket-ball. Ce constat justifie l’usage du travail intermittent comme nous allons le voir avec ses avantages et ses variantes.

A écouter les arbitres, beaucoup pensent faire de l’intermittent sans connaître les facteurs physiologiques et les répercussions sur l’organisme et sans connaître leur VMA. Il ne suffit pas de courir le long de la ligne de touche ou de surface de réparation à l’autre surface de réparation le plus vite possible et ce répéter plusieurs fois pour être dans l’intermittent. L’arbitre va penser, en finissant sa séance épuisé, qu’il aura bien travaillé, mais il sera à l’inverse du travail intermittent et donc d’un travail de qualité.

Lors d’une séance d’intermittent si plusieurs arbitres et assistants s’entraînent ensemble, il sera essentiel d’individualiser. Il n’est pas concevable que tous les arbitres et assistants fassent la même distance, le même volume de travail et le même intermittent.

I Test Physique

Avant de commencer un cycle intermittent, il est conseillé de passer un test pour déterminer la VMA (vitesse maximale aérobie). Il existe plusieurs tests mais trois ressortent plus particulièrement. Le test d’effort sur tapis, le vameval ou le test 45/15. Je pose une question : Combien d’arbitres et d’assistant(e)s passent un test VMA avant de commencer un cycle intermittent ? La réponse aucun sauf celles et ceux qui sont suivis par un préparateur physique.

La VMA est une valeur de référence qui servira à déterminer une distance. En plus de cette VMA, il sera intéressant de connaître son seuil anaérobie qui sera déterminé par un test d’effort sur tapis ou un test de 5mn sur terrain avec prise du taux de lactate (cf article sur la VMA et les seuils lactiques) pour ajuster la distance que doit parcourir l’arbitre ou l’assistant(e) et ajuster sa fréquence cardiaque lors de l’effort et de la récupération.

II Qu’est ce que la PMA ?

Beaucoup d’arbitres, d’assistant(e)s et d’anciens arbitres parlent de PMA sans en connaître la signification, sans savoir la calculer et sans savoir comment la solliciter. La PMA c’est quoi ? C’est la puissance maximale aérobie qui se traduit par la plus petite unité à laquelle un arbitre atteint son volume maximale d’oxygène. La PMA se calcul en watts lors d’un test d’effort sur vélo destiné aux coureurs cyclistes. Pour solliciter la PMA il faut travailler à 100% de sa VMA avec un minimum de travail de 6mn. On ne sollicite pas la PMA en-dessous de 100% de sa VMA car on n’atteindrait pas son volume maximal d’oxygène.

La période la plus propice pour développer cette PMA commencera chez les garçons vers l’âge de 14 et 15 ans et chez les filles vers l’âge de 12 et 13 ans après avoir passé le pic de croissance. Toutefois il faudra que le préparateur physique soit attentif et à l’écoute des adolescent(e)s car les organismes à ces âges sont fragiles notamment sur le plan ostéo-tendineux et musculaire et devra être vigilant sur le volume et la charge de travail proposé aux jeunes arbitres. Ce travail intermittent associé avec un travail aérobie sera essentiel pour développer le « moteur » de l’adolescent(e) sur le long terme. Je pose une question : Combien de jeunes arbitres candidat(e)s JAF ou JAF lors de leurs séances dans la semaine intègrent une séance d’intermittent  en respectant les règles physiologiques de la filière anaérobie lactique ? La réponse aucun.

III Avantages du travail intermittent

Ø Elève le niveau d’énergie utilisé par unité de temps (puissance maximale aérobie).

Ø Augmente la durée à laquelle le pourcentage le plus élevé de la PMA peut être maintenu (endurance).

Ø Repousse le seuil anaérobie

Ø Améliore l’endurance spécifique de la discipline

Ø Améliore la résistance à la fatigue

Ø Une récupération plus facile

Ø Une sollicitation de toutes les fibres lentes et rapides

Ø Un travail plus variés

Ø Il permet d’introduire des exercices de renforcement musculaire ou de fréquence.

IV Caractéristiques d’une séance à prendre en compte

– L’intensité (vitesse de course déterminée par le pourcentage de la VMA ou le seuil anaérobie).

– Le volume (durée totale de travail de l’exercice) / exemple 2x6mn

– Le temps de récupération entre les séries 3mn de façon active (léger footing)

V Les différents types du travail intermittent

Dans ce chapitre, nous allons aborder les différents types d’intermittents que l’arbitre ou l’assistant peut effectuer en fonction de sa discipline mais aussi de son objectif.

Il existe plusieurs types d’intermittents qui sont :

Ø Les intermittents « classiques » 30/30, 15/15

Ø L’ intermittent « sprint-course VMA »10/20 ou 10/10

Ø L’intermittent course bondissements ou fréquence

L’intermittent standard 30/30

Dans le cadre de la fonction d’arbitre quelle que soit sa discipline ou d’assistant(e), on n’utilisera pas cette modalité de travail car les efforts au cours d’une rencontre sont bien inférieurs à 30s mais je vois encore des arbitres en 2025 faire du 30/30. Je pose une question : « Quel est l’intérêt de faire du 30/30 pour un arbitre de football ? La réponse aucun ! Ce prototype d’intermittent était utile quand les arbitres devaient passer le test Werner Helsen mais cet intermittent n’a plus lieu d’être pratiqué du fait que le test Taisa est basé sur 15s de course à haute intensité. J’entends encore des arbitres faire du 30/30 sans connaître leur VMA ou sur un tapis de course. Je pose la question : Quel est l’intérêt ? La réponse aucun.

Après une analyse de courses et de déplacements des arbitres de rugby de niveau régional et fédéral, à ma connaissance, ils intègrent des séances de 30/30. Un(e) arbitre de rugby comme un(e) arbitre de football ne fait pas de courses à hautes intensités sur 30s donc je ne vois pas l’intérêt de faire de telles séances mais plutôt des séances de 15/15 voir de 10/20 qui se rapproche de la réalité des efforts produits au cours d’un match.

L’intermittent 15/15

Pour un(e) arbitre qui souhaite se préparer pour le début de la compétition, on utilisera l’intermittent 15/15. Celui-ci définit à la fois par un temps de travail plutôt long et par un temps de récupération plutôt court. Il s’agit dans ce cas précis de travailler à la VMA. Comme il s’agit d’améliorer la puissance maximale aérobie, les efforts et les récupérations ne peuvent pas se faire n’importe comment. Pour des arbitres de football ou de rugby, nous considérons que l’effort ne dépasse pas les 15 secondes de course à une intensité très élevée. La récupération doit être égale pour permettre à l’effort qui suit d’être qualitatif, mais elle doit être suffisamment brève pour ne pas permettre une chute importante de la fréquence cardiaque.

Lors d’une préparation d’avant saison avec pour objectif de l’arbitre la réussite du test Taisa, on pourra travailler sur cet intermittent voire pour se rapprocher de la réalité du test prendre 20s de récupération au lieu de 15s.

L’intermittent « sprint – course VMA 10/20 »

Dans un objectif d’améliorer les démarrages de course de l’arbitre lors d’un match et ses changements de rythme, l’intermittent 10/20 est préconisé. On pourra lors des démarrages, utiliser les méthodes de la vitesse pour forcer l’arbitre à être « explosif ». Ce travail devra être associé à un travail de musculation, de pliométrie basse et haute.

Du fait de la distance d’un demi terrain de football que peut parcourir un(e) assistant(e), il me paraît plus judicieux de travailler sur un intermittent 10/20 que sur un 15/15. Même remarque pour des arbitres de futsal, handball et basket-ball du fait des dimensions du terrain de jeu.

L’intermittent « sprint – course VMA 10/10 »

Du fait de la fonction d’assistant(e), et après plusieurs échanges avec des assistants de haut niveau, cet intermittent 10/10 est celui qui se rapproche le plus de leur activité. Mais contrairement aux arbitres où l’on travaillera uniquement en ligne droite, pour des arbitres assistant(e)s on intégrera lors de la distance en fonction de leur VMA un travail de sprint et de pas chassés afin de se rapprocher de la réalité de leur fonction car les exigences et les besoins d’un(e) assistant(e) ne sont pas les mêmes d’un arbitre central.

l’intermittent course VMA–bondissements ou fréquence

Pour des arbitres ou assistant(e)s qui, pour diverses raisons ne peuvent pas aller dans une salle de musculation ou faire du renforcement musculaire en tribune, on peut dans le cadre d’une progression, passer dans un second temps, à un travail intermittent à base de course et soit de renforcement musculaire soit de fréquence, puis à une étape intermittent course bondissements verticaux. On peut aussi construire des intermittents avec des étapes « force » et des étapes « course ». Ce type d’intermittent permettra de travailler sur le plan aérobie et musculaire.

Lorsqu’on utilise « l’intermittent –force », la première règle à appliquer est celle de l’alternance course-musculation. En effet, il faut permettre à l’organisme de récupérer sur le plan musculaire et en même temps la course maintient une activation cardiovasculaire importante. Si le préparateur physique de l’arbitre à comme base de travail le seuil anaérobie, cela lui permettra d’ajuster l’intensité de l’exercice.

VI Quand placer une séance d’intermittent dans la semaine ?

Le travail intermittent sera réalisé dans la 3ème phase de la préparation d’avant saison c’est à dire à l’approche de la compétition après un travail à base de footing et de courses continues et non 5 semaines avant la reprise du championnat comme je l’entends. Ce travail doit être une priorité et se poursuivre tout au long de la saison par cycle de 4 à 5 semaines pour améliorer et/ou maintenir un niveau d’endurance puissance suffisant. Il ne suffit pas de faire une séance d’intermittent de temps en temps pour améliorer sa condition physique.

Une séance de 15/15 sera placée dans la semaine à J-3 voir J-2 du match mais avec un minimum de volume de travail mais suffisant pour solliciter la PMA. Une séance de 10/20 sera placée à J+3 du match.

Il est important lors d’un travail intermittent de respecter certains paramètres et certaines règles physiologiques pour optimiser et augmenter le potentiel physique de l’arbitre et ainsi créer le phénomène de surcompensation (cf la surcompensation c’est quoi ?).

Des programmes sont envoyés « clés en main » aux arbitres sur plusieurs semaines avec dans le contenu, des séances de 30/30 et/ou de 15/15. En tant que préparateur physique la première erreur est d’envoyer des séances sur plusieurs semaines et la seconde c’est de planifier des séances d’intermittent sans connaître la VMA de l’arbitre, sans connaître leur état de fatigue et sans aucun suivi ce qui découle sur des blessures musculaires ou tendineuses.

Conclusion

Je m’aperçois en tant que préparateur physique, en ce qui concerne le travail de course comme dans beaucoup d’autres domaines athlétiques, les arbitres et les assistant(e)s de football font de la quantité au détriment de la qualité. Pour qu’un arbitre ou un(e) assistant(e) puisse améliorer sa condition physique et pour des jeunes arbitres développer leur système aérobie, le travail intermittent reste le plus qualitatif. Il ne suffit pas de faire du « fractionné » comme je l’entends pour améliorer son potentiel physique ou d’être coach sportif, arbitre, assistant(e), d’avoir une licence STAPS, de se prendre pour un préparateur physique et de faire faire des séances d’intermittent à des arbitres et assistant(e)s. Cela demande des connaissances physiologiques pour en connaître les répercussions sur les organismes et des compétences professionnelles. On ne s’improvise pas préparateur physique !

Eric BOITARD

DESS Préparation Physique